Propos insignifiants
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 Le Goncourt pour les Bienveillantes

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LP de Savy
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MessageSujet: Le Goncourt pour les Bienveillantes   Le Goncourt pour les Bienveillantes Icon_minitimeMer 8 Nov 2006 - 16:21


Jonathan Littell, Goncourt au premier tour


lefigaro.fr (avec AFP), 6 novembre 2006.


Choses vues, hier chez Drouant pour la proclamation des prix Goncourt et Renaudot.

En distingant Les Bienveillantes, le prestigieux prix a salué un premier roman hors norme, de près de 900 pages, et qui est d'ores et déjà un énorme succès de librairie. Le livre, écrit en français par Jonathan Littell, jeune auteur de 39 ans de nationalité américaine, a suscité l'enthousiasme de la quasi-totalité de la critique. Quelques voix se sont toutefois élevées pour s'interroger sur le danger de faire d'un officier SS le héros d'un roman.
Le couronnement du livre n'a pas vraiment été une surprise et n'a suscité aucun remous. Et pourtant, les Goncourt étaient, hier, sous haute protection, place Gaillon.

Des ordres venus de la direction du restaurant, en accord avec les académiciens, ont obligé la presse à travailler sous la surveillance de la police. Le journaliste trop curieux était expulsé manu militari du premier étage où siègent les «Dix» et le jury Renaudot. Le style de la maison n'est plus ce qu'il était.

Après le caviar impérial, le pâté en croûte de foie gras d'oie truffé et avant le homard Thermidor et le canard colvert rôti, les résultats du scrutin furent annoncés dans un cadre différent. Non plus au premier étage mais au rez-de-chaussée, en bas de l'escalier Ruhlmann rénové comme le reste de l'établissement.

Détail piquant : lorsque Didier Decoin et André Brincourt, respectivement secrétaire général des Goncourt et du Renaudot, s'avancèrent pour communiquer les noms des lauréats, ils étaient en partie cachés par le décor. Ce sont des hommes sans tête qui mirent fin au suspense. Comme l'avait pronostiqué Le Figaro, Jonathan Littell l'emportait haut la main. Au premier tour de scrutin, son roman Les Bienveillantes (Gallimard) obtenait sept voix contre une à Michel Schneider (Marilyn dernières séances, Grasset), une à Stéphane Audeguy (Fils unique, Gallimard) et une à Élie Wiesel.

Cette voix inattendue en faveur du prix Nobel de la paix, était celle de Robert Sabatier. Les deux autres venaient de Michel Tournier, très hostile à Littell, et de Daniel Boulanger, séduit par Marilyn.

Du côté des Renaudot, qui fêtaient discrètement le 80e anniversaire du prix, c'est au dixième tour de scrutin, grâce à la double voix de son président J.-M. G. Le Clézio, qu'Alain Mabanckou pour Mémoires de porc-épic (Seuil) l'emportait de justesse (voir ci-dessous). Le prix Renaudot essai revenait à Pierre Boncenne avec Pour Jean-François Revel (Plon).

L'ancien rédacteur en chef de Lire reçut d'abord les félicitations de Bernard Pivot dont il fut le collaborateur à la télévision. Pivot s'interrogeait sur le cru que Bernard Frank était en train de déguster quand il tomba foudroyé par une crise cardiaque sur sa chaise d'un restaurant du VIIIe arrondissement. À la demande de François Nourissier, les académiciens Goncourt ont levé leur verre en hommage à l'auteur de Solde.

Bernard Pivot, le dernier élu chez les Goncourt, a fait son cinéma sans la participation de ses confrères. Le réalisateur québécois Denys Arcand (Les Invasions barbares) lui avait demandé de participer à son prochain film L'Âge des ténèbres. C'est l'histoire d'un jeune homme qui rêve sa vie et pense qu'il a eu le Goncourt. Bernard Pivot, véritable star au Québec et admirateur du cinéaste, a tout de suite accepté de jouer le rôle de Didier Decoin... Se présentant comme le secrétaire général du prix, il annonce que le Goncourt est allé, au premier tour, au Québécois Jean-Marc Leblanc pour son roman Un homme sans intérêt. Sous l'oeil de Dominique Besnehard, ancien agent devenu producteur, Pivot sortit du salon avec derrière lui Marie Dabadie, la secrétaire des Goncourt. La troisième prise sera la bonne.

Quant au héros du jour, Jonathan Littell, il apprit la bonne nouvelle à Barcelone où il réside. Son éditeur Antoine Gallimard vint remercier les académiciens. Il leur précisa que Littell souhaitait que son absence ne soit pas ressentie comme un malentendu et encore moins une forme de mépris pour le jury. Sans doute viendra-t-il à Paris dans quelques jours. Incognito ?

Jean-Claude Lamy
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MessageSujet: Re: Le Goncourt pour les Bienveillantes   Le Goncourt pour les Bienveillantes Icon_minitimeMer 8 Nov 2006 - 16:36

Une exception française

L’éditorial d’Étienne de Montety, le Figaro 7 novembre 2006.

Hier, à 13 heures, devant une nuée de micros et de caméras, le secrétaire général du prix Goncourt a proclamé le verdict : le prix 2006 était décerné à Jonathan Littell pour son roman, Les Bienveillantes. À six mois d’une élection importante, la une des journaux français est consacrée à la littérature. Pays béni que celui de Montaigne, Nerval et Mauriac. Depuis des lustres, on s’y dispute pour une pièce de théâtre, on couronne un homme pour une poignée d’alexandrins, on accorde des funérailles nationales à un poète. Rien n’a changé. Ce matin, écartées les joutes pour l’investiture socialiste, évanouies les propositions des partis sur le chômage, les retraites, la sécurité de nos concitoyens, les seules questions qui vaillent portent sur un fort roman de 900 pages : « L’avez- vous lu ? » « Est- ce si bien ? » « Peut- on parler de la Shoah en ces termes ? » « Le roman at- il tous les droits ? » Depuis deux mois, c’est la presse écrite qui a conduit le succès de cet auteur qui refuse toute exhibition télévisée ( et n’a accepté les interviews radio qu’avec parcimonie). En accordant une telle importance à l’écrit ( des journaux à la littérature), la France fait montre d’un comportement exceptionnel. Là est probablement l’exception française. L’importance du prix Goncourt comme celle des élections à l’Institut dans la vie publique témoignent du poids des lettres dans son histoire : en s’entichant tous les ans d’un romancier, elle se souvient qu’elle est née aussi de Descartes et de Montesquieu, que Lamartine fut candidat à la magistrature suprême. Que ses écrivains ont un poids unique, et même une influence (quand Giscard se pencha sur le sort des boat people, il reçut Sartre et Aron). Et que dire de ce pays qui n’aime rien tant que des dirigeants dotés d’un joli brin de plume et qui accorde au premier d’entre eux le titre de protecteur de l’Académie ? Un écrivain y sera toujours à l’honneur. Ce prix Goncourt est encore une jolie démonstration de force dans une société que l’on dit menacée d’amnésie, anesthésiée par une littérature étique et nombriliste, insignifiante, qui balayerait à jamais ces gros romans de cape et d’épée qui firent pourtant plus pour l’histoire de France que bien des essais. Et voici qu’un écrivain de quarante ans plonge nos contemporains dans un bain bouillonnant, l’Europe entre 1940 et 1945. Ce faisant, il les force aussi à s’interroger sur leur passé, ses ombres et ses lumières, ainsi que sur la mystérieuse solidarité qui unit les hommes dans le bien comme dans le mal. Deux cent mille lecteurs ont, semble- t- il, accepté l’expérience en achetant Les Bienveillantes, la prolongeant même par l’étude d’essais sur le sujet ( La Destruction des Juifs d’Europe, de Raul Hilberg, connaît un succès étonnant). Enfin, en couronnant un romancier de nationalité américaine ( mais aussi une Canadienne – Nancy Huston, Prix Femina – et un Congolais, Alain Mabanckou, Prix Renaudot), la France, qui sait ce qu’elle doit à Apollinaire, à Cendrars et à Cioran, prend tranquillement acte du rayonnement de sa langue et de son esprit au-delà des mers.
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MessageSujet: Re: Le Goncourt pour les Bienveillantes   Le Goncourt pour les Bienveillantes Icon_minitimeMer 8 Nov 2006 - 16:48

Littell, un Goncourt sans audace
L'Américain a été primé pour «Les Bienveillantes» (Gallimard), l'un des phénomènes de la rentrée • Le prix a été attribué au premier tour par 7 voix contre 3 •

Par Claire Devarrieux

LIBERATION.FR : lundi 6 novembre 2006



Le Goncourt va aux «Bienveillantes», de Jonathan Littell, publié chez Gallimard. Cet impressionnant pavé de 900 pages, qui compile la Seconde guerre mondiale en la racontant du point de vue d'un jeune SS raffiné, aura été le grand succès de la rentrée littéraire. Les 250 000 exemplaires étaient largement dépassés avant même que le prix lui soit décerné. A-t-il fait le plein de ses lecteurs? Le Goncourt va-t-il au contraire décupler les ventes? On aurait pu espérer que les jurés Goncourt attirent l'attention sur un bon auteur, apprécié des critiques et des libraires, mais moins connu du grand public, comme Alain Fleisher, qui concourait avec «l'Amant en culottes courtes» (Seuil). Une petite maison d'édition de qualité, comme celle de Viviane Hamy, aurait pu être mise à l'honneur: son poulain, François Vallejo, s'est fait beaucoup remarquer (en bien) avec «Ouest». Mais non. Jonathan Littell a triomphé en septembre, Jonathan Littell triomphe en novembre et sera toujours là en décembre. Il campe en tête des bénéfices de toutes les librairies, loin devant ses collègues.
Aujourd'hui, les éditeurs autres que Gallimard doivent faire grise mine, bien que le Seuil puisse se consoler un peu avec le Renaudot décerné à un de ses auteurs, Alain Mabanckou. Il faut saluer le flair de Gallimard, qui a su mettre très vite une option sur le manuscrit. Gageons que ce texte n'aurait pas aussi bien marché s'il avait été publié ailleurs. La performance est du côté de l'éditeur, tout autant que du côté de l'auteur.
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MessageSujet: Re: Le Goncourt pour les Bienveillantes   Le Goncourt pour les Bienveillantes Icon_minitimeMer 8 Nov 2006 - 16:51

Littell assez grand pour le Goncourt

L'auteur des «Bienveillantes», confession fictive d'un officier nazi, est le premier Américain à remporter le prix littéraire français.

Par Ange-Dominique BOUZET

Libération, mardi 7 novembre 2006

Ceux qui attendaient sa venue pour la remise du Goncourt en ont été pour leurs frais : Jonathan Littell, fidèle à la discrétion qu'il observe depuis la sortie des Bienveillantes, est resté à Barcelone, où il s'est récemment établi, laissant à Antoine Gallimard, son éditeur, le soin de recueillir les lauriers pour lui.

Le premier auteur américain à remporter le Goncourt entrera donc également dans l'histoire du prix comme le plus arlésien des lauréats. Une demi-douzaine d'émissions radio, deux ou trois interviews dans la presse, essentiellement concentrées sur la fin septembre (le reste par mail), cinq présentations en librairie, aucune prestation télévisuelle... Les Bienveillantes, événement littéraire de la rentrée 2006, s'inscrit à l'exact rebours du battage médiatique de la Possibilité d'une île de Michel Houellebecq, qui avait défrayé la chronique de 2005 pour ne ramasser qu'un prix Interallié de consolation. Jonathan Littell a principalement construit son succès, foudroyant, dans les librairies.
Pseudo. A 39 ans, le fils bilingue de Robert Littell, romancier américain célèbre, n'a pas non plus abusé de la notoriété de son père (dont Gallimard a, via sa filiale Denoël, édité cinq titres). Il a, à l'anglo-saxonne, abandonné le soin de démarcher les éditeurs parisiens à un agent, en l'occurrence l'un de ceux de son père, le Britannique Andrew Nurnberg, francophone et russophone comme lui. Mais en prenant le soin de dissimuler sa filiation sous une signature cryptée : Jean Petit.
Son livre, il l'a intitulé les Bienveillantes par référence à l'Orestie d'Eschyle : c'est l'appellation antinomique attribuée aux Erinyes, divinités persécutrices, qui, à la dernière page du roman, retrouvent la trace de Maximilien Aue, nazi impuni revivant le souvenir des sanglantes campagnes qu'il a menées de 1941 à 1945.
La promptitude de réaction, rue Sébastien-Bottin, de Richard Millet, premier lecteur de ce manuscrit de mille pages signé d'un parfait inconnu, déterminera Antoine Gallimard à enlever (pour un montant non révélé) une affaire que Grasset, Lattès et Calmann-Lévy n'ont pas eu le temps ou la volonté de retenir. Pour sincère qu'il soit, l'enthousiasme de la maison reste raisonnable : les Bienveillantes, tiré sur papier spécial de 50 grammes (à 80 grammes, le volume aurait fait deux kilos), est prudemment tiré à 12 000 exemplaires, pour une première mise en place à 5 000 exemplaires.
Success-story. Le reste est une success-story, scandée par un bandeau retentissant à la une du Nouvel Observateur : «Attention, chef-d'oeuvre». Les Bienveillantes, déjouant toutes les prévisions, s'installe illico au sommet des ventes. Ses scores doublent ou triplent ceux des autres titres, semant la consternation dans le milieu éditorial : non seulement le public s'arrache le lourd opus de Jonathan Littell, mais il le lit, négligeant tout le reste ! Gallimard, dépassé, ne sait plus où donner du collier, empiétant sur les réserves de papier mises à l'abri pour Harry Potter et mobilisant trois imprimeries de conserve.
Au Virgin Megastore des Champs-Elysées, Laurent Bonnelli se félicite de son flair : «En mai, le représentant de Gallimard nous avait présenté ce livre avec des sanglots dans la voix. On lui avait passé une commande de 50 exemplaires. Les Bienveillantes a été le premier livre de la rentrée que j'ai lu : dès avant la publication, on a relevé la commande à 300 exemplaires. Le 29 août, il était déjà en tête des demandes. Jusqu'en octobre, on en a vendu 50 à 70 exemplaires par jour, avec des pointes jusqu'à 100, voire 150 le dimanche. J'ai vu la clientèle évoluer : très masculine, d'abord littéraire, motivée par la critique, elle a englobé rapidement les amateurs d'histoire ­ les acheteurs des Mémoires de Goebbels par exemple ­, et a continué à s'élargir... Même après un mois et demi, on a continué à écouler une trentaine d'exemplaires par jour, ce qui est énorme, et le prix de l'Académie française a relancé le mouvement. Aujourd'hui, on en est à 2 700 exemplaires... Alors que les réactions au Goncourt s'enregistrent habituellement le lendemain, nous en avons senti l'effet dans l'heure : à mon avis, le livre va doubler ses ventes...»
Colette Kerber (les Cahiers de Colette, à Paris) a un point de vue différent sur les Bienveillantes : «Ce n'est pas le sujet qui me choque, mais la complaisance du traitement, avec tous les clichés à la mode, homosexualité, inceste, mort de la mère ! C'est du docufiction copié-collé, écrit avec les pieds. Quand je pense qu'on le compare à Grossman ou Tolstoï !» Mais elle est confrontée aux mêmes constatations, et parle de «vampirisation» de la rentrée. Plus de la moitié de ses clients lui dit avoir arrêté la lecture en cours de route, dit-elle, mais les achats continuent.
Rupture. Rien de parisien au phénomène. Au Havre, Gilles de La Porte (la Galerne) raconte : «Au départ, en Cauchois prudents, on avait commandé six exemplaires. On a tout de suite été pris de court, et on en a manqué pendant dix jours. Pour la deuxième commande, on était passé à cinquante, mais on se disait que ce serait peut-être un feu de paille. Et on s'est trouvé à nouveau à sec pendant dix jours, avant de prendre le rythme, à deux cents...» Pour la première fois, il a décidé d'organiser une réunion autour du livre sans la participation de l'auteur: «Nous n'avons pas demandé la participation de Littell, nous savions que nous ne l'aurions pas. Mais les lecteurs nous interpellent. Ils se divisent en trois catégories : ceux qui abandonnent au bout de 300 pages, ceux qui ont la sensation de rencontrer un chef-d'oeuvre et ceux qui se sentent mal à l'aise. Ils veulent parler du livre, confronter leurs idées...»
A la foire de Francfort , les Bienveillantes a fait un malheur auprès des éditeurs étrangers. S'affirmant plus soucieux de la qualité des offres que de leur montant, Andrew Nurnberg a pris son temps pour choisir les acheteurs anglo-saxons : Chatto & Windus pour le Royaume-Uni et HarperCollins pour les Etats-Unis (moyennant, dit-on, un nombre de dollars à sept chiffres). Jonathan Littell, sans faire sa propre traduction, la surveillera de près.
Gallimard, privé des droits étrangers, a largement de quoi se consoler sur la France. L'éditeur, dès l'annonce du Goncourt, a lancé un nouveau tirage de 150 000 exemplaires. «Mais la fête, c'est quand même mieux quand on est à plusieurs», constatait mélancoliquement Antoine Gallimard, après avoir salué hier le «retrait» de l'auteur derrière son livre...
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MessageSujet: Re: Le Goncourt pour les Bienveillantes   Le Goncourt pour les Bienveillantes Icon_minitimeMer 8 Nov 2006 - 16:55

Jonathan Littell Prix Goncourt, Alain Mabanckou Prix Renaudot


Le Goncourt pour les Bienveillantes P our un coup d'essai, c'est un coup de maître. Les Bienveillantes (Gallimard), ce premier roman de 900 pages écrit à la première personne qui raconte la vie de Max Aue, homosexuel, frère incestueux, officier nazi, exterminateur de juifs, a reçu, lundi 6 novembre, le prix Goncourt 2006. Comme l'explique Françoise Chandernagor, un des jurés, "ce n'est pas un livre séducteur".

Après Patrick Rambaud avec La Bataille (Grasset), en 1997, Jonathan Littell est le deuxième auteur à obtenir le doublé des prix du roman de l'Académie française et Goncourt. Pour Gallimard, il s'agit de son 35e Goncourt, le quatrième en dix ans, mais le premier depuis cinq ans.
Les dix jurés réunis au restaurant Drouant à Paris n'ont visiblement pas eu de mal à se décider. C'est en effet par sept voix au premier tour de scrutin que le roman de Jonathan Littell, né en 1967, un Américain qui écrit en français, a été distingué. Une voix est allée à Marilyn, dernières séances, de Michel Schneider (Grasset) qui faisait partie des quatre livres finalistes. Fils unique, de Stéphane Audeguy (Gallimard), soutenu par Michel Tournier, a aussi bénéficié d'une voix. Robert Sabatier a quant à lui voté pour Elie Wiesel, qui n'avait pas de livre en compétition. Ni L'Amant en culottes courtes,d'Alain Fleischer (Le Seuil), ni Ouest, de François Vallejo (Viviane Hamy), n'ont recueilli de voix.
Contrairement à la règle, Jonathan Littell n'était pas présent au déjeuner avec les jurés qui suit l'annonce du prix. Son éditeur Antoine Gallimard était en revanche porteur d'une lettre de l'auteur, qui y écrit que "c'est un grand honneur" pour lui d'avoir reçu ce prix. S'adressant aux jurés Goncourt, Jonathan Littell justifie son absence par "(sa) position de retrait qui fait partie intégrante de (son) idée et de (son) sentiment de la littérature, idée et sentiment qui ont rendu possible l'écriture de ce livre".
Véritable phénomène de librairie avant même d'être primé, Les Bienveillantes pourraient atteindre des ventes "de 400 000 à 500 000" exemplaires, espère Antoine Gallimard. D'ores et déjà, il a pris la décision de le réimprimer à 150 000 exemplaires.
Le succès des Bienveillantes apparaît comme atypique à bien des égards. Il s'est notamment construit sans la télévision. Jonathan Littell n'est pas à l'aise avec ce média. C'est donc par des canaux plus traditionnels comme les libraires, les critiques littéraires et le bon vieux bouche-à-oreille que ce gros livre a conquis son lectorat pour devenir un best-seller.
Le livre va aussi poursuivre une carrière très prometteuse à l'international, les droits de traduction ayant été acquis dans tous les pays européens, ainsi qu'aux Etats-Unis et en Israël. Seule ombre au tableau pour Gallimard, les bénéfices de ces transactions ne reviennent qu'à l'auteur et à son agent, Andrew Nurnberg.
Au même endroit et au même moment, le prix Renaudot a été décerné à Alain Mabanckou pour Mémoires de porc-épic (Seuil). Né en 1966, au Congo, Alain Mabanckou enseigne la littérature francophone aux Etats-Unis. Il a dédié son livre à sa mère analphabète, de qui il tient l'histoire "à quelques mensonges près".
Etait-ce pour rendre un hommage posthume à Jacques Brenner (cet ancien juré Renaudot dont le journal qui vient d'être publié chez Pauvert éclaire le dessous des prix littéraires) ? Ce n'est qu'au dixième tour de scrutin et avec le recours de la double voix du président J. M. G. Le Clézio que le livre d'Alain Mabanckou l'a emporté par six suffrages contre cinq à Michel Schneider.
C'est une revanche sur le scrutin de 2005 où, en lice avec Verre cassé (Seuil), Alain Mabanckou s'était fait ravir le prix au onzième tour. Le prix avait été attribué à Mes mauvaises pensées, de Nina Bouraoui (Stock) grâce à la double voix du président Jean-Noël Pancrazi.
Le Renaudot des essais a été attribué au septième tour : le livre de Pierre Boncenne Pour Jean-François Revel l'a emporté, par six voix, contre trois à Benjamin Stora pour Les Trois Exils, Juifs d'Algérie (Stock) et une à Pierre Lepape, auteur de La Disparition de Sorel (Grasset).
Alain Beuve-Méry

Article paru dans l'édition du 08.11.06 Le Monde
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